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Chroniques
Dorothee Mields et Chelycus
passions guerrières et amoureuses
Les Rencontres musicales de Vézelay, ce sont, bien sûr, des concerts de prestige donnés en la Basilique Sainte Marie-Madeleine, chaque soir, mais aussi plusieurs rendez-vous d’importance qui jalonnent trois journées d’un festival particulièrement dynamique. Outre les concerts gratuits donnés à 18h sur la Place des rencontres se distinguent également les ateliers destinés aux enfants, qui découvrent ici la voix et ses multiples possibilités expressives, et des conférences comme celle qui eut lieu ce matin au Musée Zervos, donnée par Timothée Picard et consacrée à l’écrivain Romain Rolland, illustre vézelien à qui l’on doit un ouvrage sur Händel [lire notre critique publié lors de la réédition].
Avant de découvrir les affres du martyre de Theodora, c’est à quelques kilomètres de là, au bord de la Cure, en l’élégante église de Saint-Père, au porche gothique somptueusement ouvragé, que nous goûtons le fort beau concert proposé par l’ensemble Chelycus, un moment dédié aux Passions guerrières et amoureuses, transportant notre écoute vers les sombres ou vaillantes rumeurs de la Guerre de Trente Ans. De proportions nettement ramassées, l’édifice offre une acoustique remarquable, accordant juste ce qu’il faut d’aura aux musiciens sans dérespecter la perception de leur prestation.
Aussi apprécie-t-on l’articulation infiniment souple qui conduit la Sonate XII de Rosenmüller, la délicate réserve dans laquelle s’exprime la Battaglia de Falconieri, la grande tenue des chromatismes redoutables du Concerto grosso Op.6 n°6 de Händel, ou encore la présence particulièrement impactée du basson dans le Largo du Concerto de Fasch.
Spécialiste de ce répertoire qu’elle enseigne à la Hochschule für Musik de Weimar, le soprano allemand Dorothee Mields [photo] charme le public par ses interprétations sensibles de quelques Lieder et extraits de cantates ou d’opéras. Mettant au service d’un investissement dramatique toujours soigneusement dosé une grande intelligence du texte et une expressivité naturellement généreuse, la chanteuse, dotée d’un sens aigu de la nuance, livre un superbe Eile, mich, Gott, zu erretten, Herr, mir zu helfen ! (O Dieu, hâte-toi de me délivrer, Seigneur, hâte-toi de me secourir) de Schütz et développe An Wasserflüssen Babylon (Au bord des fleuves de Babylone) de Tunder dans un velours indicible. Son départ a cappella pour Mit Fried und Freud ich fahr dahin (Je vais mon chemin dans la paix et la joie) de Buxtehude est tout simplement saisissant.
BB